Retour sur ce début de synode en 3 images

1 - Emmaüs

Au début de l’Instrumentum Laboris (texte de l’instrument de travail qui sert de base aux travaux du synode), l’objectif du synode est exprimé ainsi:
 "Prendre soin" des jeunes n’est pas une tâche facultative pour l’Église, c’est une part substantielle de sa vocation et de sa mission dans l’histoire. C’est cela qui est à la racine de l’enjeu spécifique du prochain Synode : comme le Seigneur a marché avec les disciples d’Emmaüs (cf. Lc 24, 13-35), l’Église est invitée à accompagner tous les jeunes, sans exception, vers la joie de l’amour.
L’image donnée comme modèle de l’accompagnement des jeunes est celle d’Emmaüs, image que nous utilisons souvent d’ailleurs dans la pastorale des jeunes ; Cette image a pris une force particulière pour moi en ces premiers jours de synode. J’ai vraiment l’impression que le Christ marche avec nous ici dans une grande proximité comme avec ses deux disciples d’Emmaüs. Dans les interventions des pères synodaux s’expriment de manière humble et réaliste les joies et les aspirations mais aussi les souffrances des jeunes, leurs peines et leurs difficultés. Dans cet exercice synodal de discernement se vit une forme de relecture des pratiques ecclésiales qui donne à e les recherches, les propositions mais aussi toutes les difficultés de l’Eglise à rejoindre les jeunes dans ce monde actuel. Difficultés à faire face aux changements en cours, reconnaissance réaliste des problèmes existants, des faiblesses et pauvretés ecclésiales, de l’horreur des abus commis, des manques et échecs … J’ai l’impression qu’en entrant dans ce processus de discernement qu’est le synode avec cette première phase du « reconnaître », titre de la partie 1 de l’Instrumentum Laboris, qui correspond à la première étape de nos travaux, on perçoit une démarche qui en mettant au centre l’écoute des jeunes fait vivre à l’Eglise un chemin de prise en compte réaliste de la réalité, un chemin de vérité qui se fait chemin de conversion. Je vois ici une église humble qui reconnait ses fragilités, une église plongée dans la réalité humaine jusqu’en ses tréfonds, une église qui peut regarder les jeunes sans peurs parce qu’enracinée dans la confiance en Celui qui est le Sauveur…
Dans cette marche ensemble qu’est le synode, nous sommes les disciples d’Emmaüs qui exprimons l’inconnu venu nous rejoindre ce qui habite nos cœurs désemparés en ce temps où l’Eglise affronte crises et tempêtes. Mais nous sommes aussi comme le Christ qui marche avec les jeunes et écoute leurs cris et souffrances qui ne manquent pas de retentir dans la salle synodale. Cris et souffrances qui viennent toucher nos cœurs jusqu’à parfois faire jaillir des larmes… Un synode c’est aussi de l’émotion, des mouvements intérieurs, des sourires, des partages et des rencontres qui ne laissent pas indifférents…Au long de ces jours, tant de visages de jeunes rencontrés, écoutés me reviennent en mémoire. Ce synode que j’essaie de vivre avec une attitude profonde d’écoute de l’Esprit Saint en m’appuyant sur mon expérience de discernement des esprits forgée par la spiritualité ignatienne me donne de vivre quelque chose des Exercices spirituels… Il m’apparait comme une grande retraite et me donne finalement de démarrer déjà la relecture de mes années en pastorale des jeunes prévue pour mon temps sabbatique à Toronto à partir de novembre !

2 - La barque

Cette image marine que j’aime tant, première image de l’Eglise dans l’Evangile, m’habite même si je n’ai pas encore eu le temps d’aller voir la mer depuis que je suis à Rome ! Dans cette « société liquide », ce monde mouvant où naviguent les jeunes, nous expérimentons ici que sommes ensemble dans la barque à traverser tempêtes et calme plat. Jeunes, éducateurs/formateurs, évêques, Pape ; laïques, prêtres, consacrés, évêques ; pères synodaux, experts, auditeurs, collaborateurs au service de la bonne marche du synode… tous nous sommes de et dans cette église, corps du Christ qui se donne à voir et entendre de manière forte au synode dans sa dimension collégiale et universelle.
Mais bien plus largement nous nous sentons très fortement reliés à toute l’Eglise et portés par la prière de bien des chrétiens. Au synode, nous voyons et entendons une Eglise au cœur du monde, proche des gens, plongée dans leurs réalités, tant les prises de parole sont situées, incarnées, pétries des réalités sociales, économiques et politiques des régions d’où viennent ceux qui prennent la parole. Au synode on retrouve la planète en miniature, on touche du doigt de manière très concrete la dimension internationale incroyable de l’Eglise. On passe sans cesse d’un pays à l’autre, d’une langue à l’autre, d’un continent à l’autre, d’un accent à l’autre… on perçoit bien sûr assez vite les différences d’approches et d’expression en fonction des cultures, des situations socio-politiques et ecclésiales… Et pourtant on échange facilement, on se sent d’emblée proches, d’une même humanité, d’une même église, frères et sœurs dans la même barque avec le Christ appelés à traverser ensemble vers l’autre rive.

3 - Le latin et le smartphone

Au synode, on touche du doigt ce qu’est la tradition créative de l’Eglise en marche vers l’avenir mais enracinée dans une longue histoire … Le temps de Rome n’est pas celui de twitter ! Mais les homes et les femmes qui participent à cette rencontre sont bien de ce temps ! Ainsi on passe allégrement du latin au smartphone, du stylo à l’ordinateur, de la prière de l’angélus qui termine toutes nos sessions à la danse hip-hop de la rencontre d’hier avec les jeunes, d’un protocole vaticanesque bien huilé à la spontanéité des discussions qui finissent en selfie ou vidéo ! Par exemple, pour pouvoir intervenir une fois 4’ en plénière il faut remplir sa « postulatio loquendi » en latin mais quand vient le tour de s’exprimer on bénéficie de la plus haute technologie qui permet de voir sur l’écran le nom et le visage de celui qui parle depuis sa place ! 
Et puis pour voter « placet » ou « non placet » les évêques ont un appareil électronique à côté de leur siège qui permet aussi d’enregistrer les présences à chaque début de séance. Par ailleurs, dans leurs soutanes filetées bien repassées, les évêques ont tous leur smartphone et ne manquent pas de l’utiliser! Plusieurs prennent aussi leurs notes sur ordinateur ou tablette. Pour ma part, j’ai fait le choix de retrouver crayon et papier dans les congrégations générales mais de taper mes notes à l’ordinateur dans mon groupe de travail intitulé « Circulus anglicus » !  Et je songe à vous écrire mon prochain post facebook en latin.

Sr Nathalie BECQUART, Xavière


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